Quant à Pierre Gasly, on ne peut bien sûr pas exclure le pression d'être arrivé tout en haut de la pyramide Red Bull dont il est pilote depuis 2014... Loin de là !
Cette année-là, après avoir brillé en Formule Renault 2.0, Il a été recruté par l'équipe autrichienne, qui l'a placé pour son accession à l'étage supérieur, la Formula Renault 3.5 chez ARDEN.
Arden est bien sûr l'écurie fondée par Christian Horner, le "Team Principal" de Red bull, et le père de celui-ci, Garry Horner. Elle a été crée en 1997 par et pour Christian Horner qui courra avec elle en Formule 3000 (future GP2 puis néo-F2) en 1997 et 1998, avant de ranger le casque et de partir se former au management… Parcours qui l'a mené où l'on sait.
ARDEN, c'est une grosse machine qui a souvent abrité en son sein les pilotes des juniors teams des écuries de F1. On peut citer, Buémi, Perez, Kovalainen (respectivement Red Bull, Ferrari, Renault…), et tant d'autres à la notoriété moindre parce qu'ils n'ont pas accédé à la F1 mais qui arpentent avec succès les circuits du monde entier.
Pourquoi je reprends le fil de l'histoire à l'époque ARDEN ?! Parce qu'on doit considérer cette équipe comme un TOP TEAM des disciplines qui emmènent à la F1. Il n'est pas question chez ARDEN du concept à l'ancienne "une année pour apprendre, une année pour gagner". Avec ce type d'équipe, c'est tout l'avenir d'un pilote qui se joue. Elle les place sur la voie royale, elle choisit qui elle accepte au volant, la crème de la crème, mais le pilote doit vivre d'entrée avec l'obligation de résultats.
Gasly vit donc avec la pression Red Bull depuis cinq ans. et en 2014, on s'est rendu compte que le jeune Pierre tout doué et talentueux qu'il était déjà, avait un problème.
On a vite eu coutume de dire de lui que c'était un "diesel". Pas le type de pilote le plus rapide donc, mais très bosseur, et très mûr. Il n'était donc pas de la trempe des Verstappen ou des Hamilton, le genre de diamants qu'on recherche à travers les Junior Teams, mais un "Top Driver" en devenir tout de même ; un très bon soldat… un futur N°2 de Top Team en F1 quoi...
En 3.5, il s'est fait battre par un autre pilote estampillé Red Bull, Carlos Sainz Jr. qui avait été placé chez DAMS l'équipe de Jean-Paul Driot).
Red Bull n'a donc pas pleuré toutes les larmes de son corps…
En 2015; il intègre l'équipe de pointe comme pilote de développement et de simulateur et Red bull l'envoie en GP2, chez DAMS. Mais DAMS n'est pas dans le coup, c'est ART, avec Vandoorne, un junior McLaren, qui écrase tout.
Aucune victoire pour Gasly. Red Bull le repêche tout de même et l'envoie chez les italiens de Prema tout en le gardant au sein de son Team F1. Belle confiance, mais le couteau sous la gorge a été affuté. Dernière chance…
Et il remporte le titre ! À croire qu'il en a besoin de la pression…
En 2017, il est barré pour un baquet en F1 chez Toro Rosso par l'infernale partie de dominos qui s'est et se dispute entre Verstappen, Kvyat et Sainz Jr. (problème de très très riches) pour le second baquet Red Bull aux côtés de Ricciardo ou la poursuite de l'aventure en F1… Pour mémoire, Kvyat se fait rétrograder chez Toro Rosso et remplacer par Verstappen qui remporte le GP d'Espagne 2016 dès son premier Grand-Prix. Ça y est, Red Bull a son diamant mais une grosse boîte de perles dont il ne sait pas vraiment quoi faire… Il ne faut pas laisser Kvyat, reconnu pour être un requin, se réveiller ailleurs que chez eux.
Un miracle se produit ; Sainz se sâchant barré maintenant pour l'équipe de pointe, décide de sortir son poignard et de viser le dos de Red Bull... et donc de quitter le giron autrichien en partant pour Renault avant la fin de la saison récupérer le baquet de Palmer et s'offrir un autre avenir (à raison, il est maintenant N°1 chez McLaren avec une énorme côte d'amour dans le paddock).
Voilà Gasly bombardé chez Toro Rosso avec en prime un volant pour 2018. Un volant sur un siège absolument éjectable. La pression, il va l'avoir façon Helmut Marko. Le couteau sera un sabre aiguisé.
En effet le sympathique Helmut
, ni fou ni aveugle, envoie le Français, alors que l'Espagnol aiguise son arme en toute discrétion, garder le goût de la compétition au Japon en Super Formula, une monoplace aux performances à mi-chemin entre celles des GP2 et des F1, dont Stoffel Vandoorne vient de remporter le titre.
Toujours diesel, Gasly démarre passablement et va échouer dans la conquête du titre après une belle remontée au championnat. Les deux dernières courses à Suzuka ayant été annulées à cause d'un… typhon , c'est un Nippon qui l'emporte pour… 0.5 point !!
Marko embarque donc définitivement Gasly en F1, le problème de riche s'étant réglé de lui-même. Un peu trop même...
Voilà Red Bull obligé d'aller puiser dans le vivier de ses anciens membres du Junior Team et de rappeler Brendon Hartley, devenu entre temps pilote Porsche en WEC avec qui il sera Champion du Monde et vainqueur des 24h du Mans…
Et Gasly de vivre sa première saison complète de F1 sans véritable pression, avec un coéquipier pas tout à fait à jour de ses connaissances en F1 (mais toutefois expert en motorisations hybrides, ceci explique cela… un transfert de connaissance techniques n'est pas sans importance dans la valeur des pilotes).
Le Néo-Zélandais n'a pas touché une F1 depuis 2012 lorsqu'il fut testeur pour Mercedes (alors atmo) après avoir été débarqué de la nurserie Red Bull.
Évidemment pas de miracle… Gasly sera plus performant mais aussi plus opportuniste que Hartley et s'n sortira donc avec les honneurs. Mais c'est un faux-semblant.
La F1 n'est pas une discipline comme les autres dans le monde de la monoplace. elle n'est pas une formule monotype. C'est un championnat de constructeurs et de motoristes avant-tout !
Et ce qui fait une partie de son sel, c'est que tous ces engins dispendieux, monstres de technologies, si intrinsèquement différents les uns des autres, roulent toutes… sur les mêmes pneus.
Une aberration en soi…
En F1, on n'a pas le temps d'apprendre… Enfin pas longtemps. Des entreprises misent des centaines de millions d'euros sur des commandos et des développements à marche forcée. Alors le cocon Toro Rosso pour un long pensionnaire de l'entité Red Bull, ça peut se transformer en piège. Et Gasly avait en plus avec Hartley un genre de "camouflage". On peut donc légitimement se demander ce que d'autres pilotes auraient réussi avec la Toro Rosso, mais pour arriver à de simples spéculations...
Ricciardo, agacé de l'idolâtrie envers Verstappen alors que c'est lui depuis qu'il avait poussé Vettel vers la sortie, qui sauvait la face de Red Bull depuis que l'accident industriel des moteurs Renault n'en finissait plus… refit le coup de Sainz, puissance 10 !
À la fin de l'été, à la surprise générale cette fois, ciao Marko et consorts… direction Renault et un salaire largement mérité (aussi…).
Voilà Red Bull obligé de faire monter Gasly aux côtés de sa star, dans une monoplace pas spécifiquement conçue pour le Néerlandais, mais forcément bien plus pointue que la Toro Rosso, et en constante évolution.
Il n'a jamais su trouver le fil et s'est perdu de mois en mois de plus en plus, transformant sa courbe ascendante et son destin si favorable en descente inéluctable.
S'il ne sera jamais N°1 d'un Top Team, il doit maintenant montrer qu'il a le mental, de l'estomac même, celui qui permet de refaire surface, d'avaler des couleuvres, de redevenir plus qu'un potentiel, un intéressant N°2, un Massa, un Barrichello..; voire même qui sait, un Webber.
Parce qu'aussi, il n'y aura plus personne pour le rattraper par les bretelles, même tricolores, Renault venant de perdre McLaren, son dernier client et partenaire, de retour avec Mercedes en 2021. Le losange se dirige donc doucement vers la sortie… Et si Enstone (le département châssis ex-Toleman, ex-Benetton, ...) se retrouve sur le marché l'an prochain, il faut se souvenir que Gasly n'est affilié avec aucun motoriste en particulier. Avec Ocon qui gardera au revers de sa veste une étoile, même si l'Estéban fait à nouveau le zouave comme on l'a tant vu faire chez Force India, il restera en odeur de sainteté dans le paddock… pour son entregent.
Pierre Gasly a donc retrouvé le cocon, et un certain goût de la bagarre (on l'a encore vu ce matin) même si ce n'est pas sa nature. Il n'est pas Vergne et ne sera pas perdu par sa grande gueule. Mais Toro Rosso ne sera maintenant qu'un nouveau départ pour ailleurs. Une pression différente qu'il doit ressentir… Celle de la gravité, du retour sur terre.
L'envol vers d'autres cieux, c'est pour 2021, date de péremption Toro Rosso oblige. Mais Marko, Horner, Red Bull et en particulier Honda on ressorti les lames. Vendredi matin, c'est dans la monoplace de Gasly que le protégé de Honda a roulé.
Naoki Yamamoto, Champion Super GT, et surtout Super Formula 2018 (en passe d'accrocher le 2019) s'est montré performant !! Qu'il connaisse par cœur Suzuka n'y change rien… Une F1 est un engin unique encore une fois… Et même si la Toro Rosso semble mieux correspondre à Gasly, il semble hélas que ce ne soit pas son exclusivité. De quoi aussi réveiller l'appétit d'anciens de la filière Red Bull qui vont retrouver bien vite le numéro de téléphone d'Helmut Marko.
Allez, place aux images, ça évitera de botter les fesses de Ferrari, Vettel et Leclerc pour la 759864ème fois… Ils sont épuisants...